Family members say goodbye to a child through a fence at the ghetto's central prison where children, the sick, and the elderly were ...

Chelmno-Kulmhof

Le village de Chelmno (en allemand Kulmhof) est situé à environ 70 km au nord-ouest de Lodz, le long du Ner, un affluent de la rivière Warta dans le centre-ouest de la Pologne d'aujourd'hui. Sous l'occupation allemande pendant la Seconde Guerre mondiale, Chelmno était situé dans le Reichsgau Wartheland (ou Warthegau), le territoire de Grande Pologne occupé, annexé et incorporé au troisième Reich qui avait pour chef lieu Poznan. Les autorités de la police et de la SS y créèrent un camp de mise à mort afin d'éliminer la population juive du Reichsgau Wartheland, y compris celle du ghetto de Lodz. Ce fut la première installation fixe où du gaz toxique fut utilisé pour les exterminations de masse.

Le “centre de mise à mort” se composait d'un manoir abandonné situé dans le village de Chelmno et, à environ 4 km au nord-ouest, d'une grande clairière s'étendant de l'est de la route qui menait à Kolo jusqu'au village de Rzuchow au sud. Ces deux sites sont connus comme le Schlosslager (camp du manoir) et le Waldlager (camp de la forêt). Le Schlosslager servait de centre de réception et comprenait des salles dans lesquelles les détenus se déshabillaient et déposaient leurs objets de valeur. Les SS, les policiers et les gardiens étaient hébergés dans d'autres bâtiments en ville. La zone du manoir était entourée d'une haute clôture en bois. Au Waldlager, situé dans la forêt voisine de Rzuchowski et également clôturé, se trouvaient des fosses communes et des fours crématoires.

A Chelmno, les SS et les policiers procédèrent à des exterminations sous l'autorité du chef de la SS et de la police du district de Wartheland, le Général SS Wilhem Koppe. Koppe confia la direction du détachement spécial déployé à Chelmno au capitaine SS Herbert Lange, alors commandant de la police de sécurité et du service de renseignement (Sicherheitsdienst) de Poznan. Lange fut remplacé en avril 1942 par le capitaine SS Hans Bothmann. Lange, ainsi que certains de ses collègues officiers, avait déjà acquis une expérience dans les meurtres de masse avec l'extermination de Polonais handicapés en 1940. Les rangs du Sonderkommando Lange (appelé plus tard le Sonderkommando Bothmann) étaient composés de membres de la Gestapo, de la police criminelle et de la police de l'ordre, et étaient dirigés par des agents de la police de sécurité et du service de renseignement. Au maximum de sa force, le Sonderkommando comptait un peu moins de 100 hommes dont environ 80 appartenaient à la police de l'ordre.

Les SS et la police commencèrent les opérations à Chelmno le 8 décembre 1941. Pendant les cinq premières semaines, les victimes furent des Juifs du Wartheland qui habitaient à proximité du village. Ils étaient transportés en camion de chez eux jusqu'au camp du château puis, sous la surveillance des membres du Sonderkommando, étaient débarqués camion par camion dans la cour du manoir. Les responsables SS, qui portaient souvent des blouses blanches de médecins, leur annonçaient qu'ils allaient être envoyés en Allemagne comme travailleurs forcés mais qu'ils devaient d'abord se laver et que leurs vêtements devaient être désinfectés. Ils étaient alors conduits dans le manoir où ils recevaient l'ordre de se déshabiller et de remettre leurs biens précieux contre un reçu délivré par un civil polonais membre du Sonderkommando. Les prisonniers nus étaient conduits à la cave d'où ils devaient descendre une rampe qui les conduisait à l'arrière d'un grand camion pouvant contenir 50 à 70 personnes. Lorsque le camion était plein, les portes étaient fermées et scellées. Un mécanicien attachait un tuyau au pot d'échappement du camion et démarrait le moteur, diffusant le monoxyde de carbone dans le camion pour tuer les prisonniers par asphyxie. Une fois le tuyau détaché, le camion rempli de corps était conduit dans le camp de la forêt, où les corps étaient jetés dans des charniers. Les victimes découvertes vivantes, lorsque les corps étaient déchargés, étaient abattues par les SS et les policiers en service.

Le 16 janvier 1942, la SS et la police commencèrent la déportation des Juifs du ghetto de Lodz. Transportés par train de marchandises de Lodz jusqu'à Kolo, à environ 9,5 km au nord-ouest de Chelmno, ils étaient ensuite transférés à bord d'un train qui empruntait une voie étroite en direction de la gare de Powiercie, à environ 5 km au nord-ouest de Chelmno. De là, ils étaient transportés par camion jusqu'au camp du manoir où ils étaient exterminés.

Un petit nombre de prisonniers juifs était sélectionné parmi les arrivants pour être affecté à un Sonderkommando (détachement de travail forcé) de 50 à 60 hommes assigné au camp de la forêt. Ces prisonniers sortaient les cadavres des camions de gazage et les enterraient dans les fosses communes.

A partir de l'été 1942, comme les charniers étaient remplis et que l'odeur des corps en décomposition commençait à se répandre dans les villages avoisinants, les SS et les fonctionnaires de police ordonnèrent de brûler les corps dans des “fours” à ciel ouvert fabriqués à partir de voies ferrées. Les membres juifs du Sonderkommando étaient également chargés d'exhumer les tombes et de brûler les corps. Ils devaient également trier les vêtements des victimes et de nettoyer les camions. Un autre petit détachement composé d'une quinzaine de Juifs travaillait au manoir, triait et emballait les biens des victimes. Entre 8 et 10 artisans qualifiés fabriquaient ou réparaient des marchandises pour le Sonderkommando. Ces travailleurs forcés étaient régulièrement tués et remplacés par de nouveaux arrivants.

LES DEPORTATIONS VERS CHELMNO

La SS et la police menèrent des opérations d'extermination à Chelmno du 8 décembre 1941 jusqu'en mars 1943 puis de nouveau, pendant une brève période, en juin-juillet 1944 au camp de la forêt. Du début décembre 1941 à la mi-janvier 1942, les Juifs des villes et villages alentours furent directement transportés en camion à Chelmno. Les premiers convois inclurent des Juifs de Kolo, Dabie, Sompolno, Klodowa, Babiak et Kowale Panskie.

A partir de la mi-janvier 1942, les victimes du ghetto de Lodz furent déportées à Chelmno dans des trains de marchandises. Les transports du ghetto de Lodz comprenaient aussi les Juifs qui avaient été déportés d'Allemagne, d'Autriche, de Bohème-Moravie, et du Luxembourg. Pendant l'année 1942, les Juifs du Warthergau continuèrent d'être déportés à Chelmno où ils étaient tués. Parmi les autres victimes assassinées à Chelmno, on compta aussi plusieurs centaines de Polonais non-juifs et des prisonniers de guerre soviétiques. Bon nombre des 5 000 Tsiganes, qui avaient été déportés d'Autriche et incarcérés dans le ghetto de Lodz en 1941, figuraient aussi parmi les premières victimes du camp.

Les convois vers Chelmno cessèrent en mars 1943 car la plupart des Juifs du Warthegau (à l'exception de ceux qui vivaient encore dans le ghetto de Lodz) avaient été exterminés. Le camp fut démantelé, le manoir et les fours à ciel ouvert démolis et les derniers travailleurs forcés juifs abattus. Cependant, en juin 1944, les Allemands reprirent les déportations à Chelmno afin de faciliter la liquidation du ghetto de Lodz. Le Sonderkommando Bothmann retourna au camp de la forêt et supervisa les opérations d'extermination. En 1944, les victimes passaient une nuit dans le village de Chelmno puis elles étaient conduites au camp de la forêt où deux baraques de réception et deux fours crématoires avaient été construits. Des SS et des policiers les surveillaient pendant qu'elles se déshabillaient et donnaient leurs objets de valeur, puis les tuaient par asphyxie dans un camion à gaz ou par balles. A partir de la mi-juillet, le reste des habitants du ghetto fut déporté vers Auschwitz-Birkenau.

Sept Juifs, tous appartenant au détachement chargé des sépultures, s'échappèrent de Chelmno. Mordechai Podchlebnik, Milnak Meyer, Abraham Tauber, Abram Roj ainsi qu'un mystérieux “Szlamek,” dont l'identité n'a jamais pu être formellement établie, s'échappèrent lors de l'hiver 1942. Mordechai Zurawski et Simon Srebnik s'échappèrent en janvier 1945 alors qu'ils travaillaient à démanteler le centre de mise à mort. Podchlebnik, Zurawski, Srebnik et Roj survécurent à la guerre. Bien qu'il n'ait pas survécu à la guerre, “Szlamek” trouva refuge dans le ghetto de Varsovie et raconta ses expériences. La résistance juive transmit clandestinement à l'Ouest, via la résistance polonaise, le compte-rendu de “Szlamek” faisant état de l'extermination systématique des Juifs par les Allemands à Chelmno au moyen du gaz toxique. Ce compte-rendu parut dans un article du New-York Times publié en page 6 de l'édition du 2 juillet 1942.

A partir de septembre 1944, un groupe de prisonniers juifs ne venant vraisemblablement pas du district de Wartheland, fut contraint d'exhumer et d'incinérer tous les corps qui restaient dans les charniers de Chelmno afin de supprimer, dans le cadre de l'Aktion 1005, les preuves des massacres de masse allemands. Une fois ce travail terminé, les SS et les policiers abattirent près de la moitié du détachement de 80 hommes en novembre 1944. Les Nazis abandonnèrent le camp de Chelmno dans la nuit du 17 janvier 1945 alors que l'armée soviétique approchait. Au moins 152 000 personnes furent tuées à Chelmno entre décembre 1941 et mars 1943 et au cours des mois de juin et juillet 1944.

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