Qu'est-ce que la Shoah ?

La Shoah est le meurtre systématique et cautionné par l'État de six millions de Juifs d'Europe perpétré par le régime nazi allemand, ses alliés et ses collaborateurs1 . Le terme provient du mot hébreu signifiant « catastrophe ». Le Musée commémoratif américain de l'Holocauste (USHMM) en définit la période entre 1933 et 1945. L'époque de la Shoah débute en janvier 1933 lorsqu'Adolf Hitler et le Parti nazi accèdent au pouvoir en Allemagne. Elle se termine en mai 1945 avec la défaite de l'Allemagne nazie contre les puissances alliées à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le terme « Holocauste » est également utilisé, notamment aux États-Unis. 

Membres des SA (Sturmabteilung - sections d’assaut), avec des pancartes de boycott, bloquant l’entrée d’une boutique appartenant ...

Lorsqu'ils arrivèrent au pouvoir en Allemagne, les Nazis ne procédèrent pas immédiatement au meurtre de masse. Par contre, bien vite, ils se servirent du gouvernement pour cibler et exclure les Juifs de la société allemande. Entre autres mesures antisémites, le régime promulgua des lois discriminatoires et recourut à des violences organisées qui visaient directement les Juifs d'Allemagne. Ces persécutions se radicalisèrent progressivement à partir de 1933 et jusqu'en 1945, le point culminant étant le plan que les chefs nazis désignaient sous le nom de « Solution finale à la question juive ». Cette solution finale se définit comme le meurtre de masse planifié et systématique des Juifs d'Europe, un génocide que le régime mit en place entre 1941 et 1945.

Pourquoi les Nazis ciblaient-ils les Juifs ?

Les Nazis ciblaient les Juifs parce qu'ils étaient radicalement antisémites, c'est-à-dire qu'ils entretenaient des préjugés et une haine contre eux. De fait, l'antisémitisme représentait l'un des principes de base de leur idéologie, au fondement de leur vision du monde.

Ils accusaient les Juifs d'être la cause des problèmes sociaux, économiques, politiques et culturels que connaissait alors l'Allemagne. Plus particulièrement, ils les tenaient pour responsables d'avoir perdu la Première Guerre mondiale (1914-1918). Certains Allemands accueillaient volontiers ces thèses, et la colère que généra le conflit, puis les crises économiques et politiques qui suivirent contribuèrent à diffuser l'antisémitisme au sein de la société allemande. L'instabilité du pays sous la République de Weimar (1918-1933), la peur du communisme, et les secousses économiques de la Dépression incitèrent également la population à se montrer plus favorable aux idées nazies, notamment à l'antisémitisme.

Cependant, ce ne sont pas les Nazis qui inventèrent l'antisémitisme, ce type de préjugé largement répandu ayant pris de nombreuses formes dans l'Histoire. En ce qui concerne l'Europe, il remonte aux temps anciens : au Moyen Âge (VIe-XIVe siècles), les idées reçues visant les Juifs se basèrent principalement sur de vieilles croyances et pensées chrétiennes, notamment sur le mythe selon lequel les Juifs étaient responsables de la mort de Jésus. Ces soupçons et cette discrimination s'ancraient dans des préjugés religieux qui se prolongèrent dans l'Europe moderne (XVe-XVIIIe siècles). À cette époque, nombreux furent les chefs de file de l'Europe chrétienne qui isolèrent les Juifs de la vie économique, sociale et politique. Cette exclusion contribua à former les stéréotypes, les Juifs étant considérés comme des étrangers. Puis au fur et à mesure que l'Europe se sécularisait, les restrictions juridiques furent supprimées dans de nombreux endroits. Cela ne signifia pas pour autant la fin de l'antisémitisme, qui prit d'autres formes aux XVIIIe et XIXe siècles : l'antisémitisme religieux revêtit un aspect économique, nationaliste et racial. Au XIXe siècle, les antisémites avançaient à tort que les Juifs étaient responsables des multiples maux sociaux et politiques d'une nouvelle société industrielle. Les théories liées à la race, l'eugénisme et le darwinisme social venaient justifier, toujours abusivement, ces haines. Parmi ces éléments, c'est surtout sur l'antisémitisme racial que se basent les préjugés nazis, à savoir l'idée discriminatoire que les Juifs sont une race à part et inférieure.

Tableau avec l'inscription : « Die Nürnberger Gesetze. » [Les Lois raciales de Nuremberg].

Le Parti nazi prônait une forme particulièrement virulente d'antisémitisme racial, point central d'une vision du monde basé sur la race. Pour les Nazis, les hommes se divisaient en effet en quatre races distinctes, certaines étant supérieures aux autres. Ainsi, les Allemands étaient membres d'une race « aryenne » soi-disant supérieure et prise en conflit avec d'autres, inférieures. Quant à la race dite « juive », elle se trouvait tout en bas de l'échelle, mais la plus dangereuse de toutes. Les Juifs devenaient alors une menace qu'il fallait éliminer de la société allemande. Sans quoi, insistaient les Allemands, elle corromprait et détruirait à jamais le peuple allemand. Cette définition nazie basée sur la race incluait également des personnes qui se considéraient comme chrétiennes et ne pratiquaient pas le judaïsme.

Où la Shoah s'est-elle déroulée ?

La Shoah est une initiative de l'Allemagne nazie qui a été mise en place dans toute l'Allemagne et dans l'Europe dominée par l'Axe. Pratiquement toute la population juive du continent a été touchée, soit, en 1933, 9 millions de personnes.

La Shoah eut pour point de départ l'Allemagne après la nomination en janvier 1933 d'Adolf Hitler au poste de chancelier. Très vite, le régime nazi (qui s'était donné pour nom le Troisième Reich) se mit à exclure les Juifs de la vie économique, politique, sociale et culturelle. Au cours des années 1930, ils se virent de plus en plus contraints à émigrer.

Mais la persécution nazie contre eux s'étendait au-delà de l'Allemagne, grâce à une agressive politique étrangère, qui mena à la Seconde Guerre mondiale en 1939. Déjà avant le conflit, l'expansion territoriale avait assujetti des millions de Juifs en plus au contrôle allemand.

Plus précisément, dès 1938-1939, l'Allemagne annexa l'Autriche et les Sudètes voisins, puis occupa les terres tchèques. Le 1er septembre, elle commença la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) en attaquant la Pologne. Les deux années qui suivirent, elle envahit et occupa une grande partie de l'Europe, jusqu'aux régions à l'ouest de l'Union soviétique. Puis, grâce à des alliances avec les gouvernements italien, hongrois, roumain et bulgare, ainsi que la création d'États fantoches en Slovaquie et en Croatie, son pouvoir s'étendit. Ses pays, auxquels vint s'ajouter le Japon, formèrent les membres européens de l'alliance de l'Axe.

En 1942, suite aux annexions, invasions, occupations et alliances, l'Allemagne nazie dominait ainsi pratiquement toute l'Europe et une partie de l'Afrique du Nord. S'ensuivirent des politiques brutales puis le meurtre de masse de civils juifs sur tout le continent.

Les Nazis, leurs alliés et collaborateurs assassinèrent six millions de Juifs.

Les conquêtes allemandes en Europe, 1939-1942

Comment l'Allemagne nazie, ses alliés et ses collaborateurs persécutèrent-ils le peuple juif ?

Entre 1933 et 1945, l'Allemagne nazie, ses alliés et ses collaborateurs mirent en place quantité de nouvelles politiques et mesures. Parce qu'elles variaient d'un endroit à l'autre, tous les Juifs ne vécurent pas la Shoah de la même façon. Il n'empêche que des millions de gens furent persécutés simplement parce qu'ils étaient identifiés comme Juifs.

Les persécutions contre les Juifs prirent diverses formes selon les territoires contrôlés par l'Allemagne ou alignés :

  • Une discrimination licite sous la forme de lois antisémites, comme les lois raciales de Nuremberg et une vaste législation discriminatoire.
  • Diverses formes d'identification et d'exclusion publiques, comme la propagande antisémite, le boycott de commerce dont les Juifs étaient propriétaires, l'humiliation publique ou les signes distinctifs imposés (par exemple, l'étoile de David portée en brassard ou sur les vêtements).
  • Une violence organisée. L'exemple le plus notable est Kristallnacht. Il y eut également des incidents isolés et des pogroms (émeutes violentes).
  • Les déplacements de population. Les auteurs des crimes recouraient à l'émigration forcée, la réinstallation, l'expulsion, la déportation et la ghettoïsation pour déplacer physiquement des individus et des communautés juives.
  • L'internement. Les auteurs des crimes enfermaient les Juifs dans des ghettos, des camps de concentration et de travaux forcés surpeuplés où ils mouraient de faim, de maladies, ou des suites de traitements inhumains.
  • Le vol et le pillage à grande échelle. La confiscation de biens juifs, d'effets personnels et d'objets de valeur a constitué un pan capital de la Shoah.
  • Le travail forcé. Les Juifs devaient se soumettre au travail forcé dans le cadre de l'effort de guerre de l'Axe, ou au profit d'organisations nazies, de l'armée, et/ou de compagnies privées.

De nombreux Juifs sont morts suite à ces politiques. Mais, les Nazis n'ont pas immédiatement envisagé le meurtre de masse systématique des Juifs. C'est en 1941 qu'ils ont décidé de le mettre en place. Leur plan était désigné sous le nom de « Solution finale à la question juive ».

Que représentait la « Solution finale à la question juive » ?

La « Solution finale à la question juive » (« Endlösung der Judenfrage ») se définit par le meurtre de masse délibéré et systématique des Juifs d'Europe. C'est la dernière étape de la Shoah, entre 1941 et 1945. Si de nombreux Juifs furent tués avant que la « solution finale » soit mise en place, la grande majorité d'entre eux furent exterminés au cours de cette période. 

Des jeunes filles posent dans une cour de la ville d'Eisiskes

Dans le cadre de ce plan, l'Allemagne nazie eut recours au meurtre de masse à une échelle inédite. Deux méthodes étaient utilisées : les exécutions de masse par des unités allemandes en dehors les villes et villages de toute l'Europe de l'Est, et l'asphyxie par le gaz, des opérations conduites dans des centres de mise à mort et dans des camions aménagés à cet effet.

Les exécutions de masse

Le régime nazi perpétra des exécutions de masses de civils dans des proportions inégalées. Après l'invasion de l'Union soviétique en juin 1941, des unités allemandes commencèrent à éliminer les Juifs des environs. Dans un premier temps, elles visaient les hommes en âge de faire l'armée, mais en août, ce sont des communautés entières qu'elles massacraient sans distinction, souvent en plein jour, au vu et au su des habitants.

Ces opérations eurent lieu dans plus de 1500 villes et villages d'Europe de l'Est. Les unités allemandes chargées des exécutions se déplaçaient d'un endroit à l'autre afin d'y commettre leur horrible massacre. Elles commençaient en général par des rafles visant à rassembler tous les civils juifs. Puis elles les amenaient aux frontières de la ville et les forçaient à creuser des fosses communes (il arrivait que celles-ci soient déjà prêtes). Enfin, les forces allemandes et/ou des unités auxiliaires locales exécutaient hommes, femmes et enfants de sorte qu'ils s'écroulent dans les fosses. Parfois, des camions à gaz mobiles, spécialement conçus pour ces opérations, étaient utilisés. Les victimes y suffoquaient lorsque le dioxyde de carbone remplissait le véhicule.

Les Allemands procédèrent également à des exécutions de masse sur des sites dédiés, en Europe de l'Est occupée. Ceux-ci se trouvaient en général aux abords des grandes villes. Parmi eux, on peut citer le Fort IX de Kaunas (Kovno), les forêts de Rumbula et de Bikernieki à Riga, ou Maly Trostenets près de Minsk. Sur ces lieux de massacre, les Allemands et leurs collaborateurs locaux tuèrent des dizaines de milliers de Juifs venus des ghettos de Kovno, Riga et Minsk. Ils y exécutèrent aussi en nombre égal des Juifs allemands, autrichiens et tchèques. À Maly Trostenets, des milliers de victimes furent assassinées dans des camions à gaz.

Parmi les unités allemandes chargées des exécutions en Europe de l'Est se trouvaient les Einsatzgruppen (forces spéciales de la SS et de la police), des bataillons de la Police de l'ordre et des unités de la Waffen-SS. C'est l'armée allemande (Wehrmacht) qui fournissait le soutien logistique et la main-d'œuvre, et qui parfois envoyait ses propres unités pour procéder aux exécutions. Et à de nombreux endroits, des unités auxiliaires locales, composées de civils locaux, de soldats et de policiers, s'associaient à la SS et la police allemande.

Jusqu'à 2 millions de Juifs furent assassinés lors d'exécutions de masse ou dans des camions à gaz sur les territoires saisis par les forces soviétiques.

Les centres de mise à mort

Photographie de Dawid Samoszul

À la fin 1941, le régime nazi entama la construction de bâtiments spécialement conçus pour servir de centres de mise à mort fixes en Pologne occupée. Ces lieux sont également désignés sous le nom de « camps d'extermination » ou « camps de la mort ». On en compte cinq : Chelmno, Belzec, Sobibor, Treblinka, et Auschwitz-Birkenau. Les Allemands les mirent en place dans le seul but d'assassiner des Juifs de manière efficace et sur une grande échelle. Le principal moyen utilisé était le gaz, diffusé dans des salles ou des camions hermétiquement fermés.

Les autorités allemandes, avec l'aide de leurs alliés et collaborateurs, transportaient les Juifs depuis toute l'Europe vers ces centres de mise à mort. Ils dissimulaient leurs intentions en parlant de « réinstallation » ou de « convois d'évacuation ». Dans le langage courant, on les appelle souvent des « déportations ». La plupart se faisaient par train. En effet, afin d'amener les Juifs dans les centres de mise à mort de manière la plus efficace possible, les autorités allemandes utilisèrent le vaste réseau ferroviaire européen, en plus d'autres moyens de transport. Il n'était pas rare que les trains soient des wagons de marchandises, même si dans d'autres cas, il s'agissait de voitures de voyageurs.

Les conditions de transports étaient terribles. Les Allemands et les autorités locales collaboratrices entassaient dans les wagons des Juifs de tous âges qui devaient souvent rester debout, parfois des jours entiers jusqu'à l'arrivée à destination. Ils étaient privés de nourriture, d'eau, de toilettes, de chauffage et de soins. En raison de ce traitement inhumain, nombreuses furent les victimes qui moururent en route.

La grande majorité des Juifs déportés vers les centres de mise à mort étaient gazés presqu'immédiatement après leur arrivée. Ceux que les fonctionnaires allemands estimaient en bonne santé et assez forts étaient sélectionnés pour le travail forcé.

Ma mère courut vers moi, m'attrapa par les épaules et me dit : « Leibele, je ne vais pas te revoir. Prends soin de ton frère. » 
Leo Schneiderman, description de l'arrivée à Auschwitz, de la sélection et de sa séparation de sa famille

Dans les cinq centres de mise à mort, les Allemands contraignaient les prisonniers juifs à participer au processus meurtrier, les chargeant notamment de trier les biens des victimes et d'aller chercher leurs corps dans les chambres à gaz. Des unités spéciales se débarrassaient des cadavres en masse. Ceux-ci étaient brûlés dans des fosses ou dans des fours crématoires conçus à cet effet.

Près de 2,7 millions d'hommes, de femmes et d'enfants juifs furent assassinés dans les cinq centres de mise à mort.

Qu'est-ce que le ghetto et pourquoi les autorités allemandes en créèrent pendant la Shoah ?

Le ghetto est la zone d'une ville où l'occupant allemand forçait les Juifs à vivre, trop nombreux dans un espace réduit et dans des conditions insalubres. Souvent, les autorités érigeaient des murs et autres barrières pour délimiter les lieux, et des gardes empêchaient les Juifs de sortir sans permission. Certains ghettos furent maintenus pendant des années, tandis que d'autres furent utilisés le temps de quelques mois, semaines, voire jours, servant de sites de détention avant la déportation ou le meurtre.

C'est en Pologne occupée que les fonctionnaires allemands créèrent les premiers ghettos, en 1939-1940. Les deux plus grands se situaient dans les villes de Varsovie et de Lodz (Łódź). À partir de juin 1941, après l'attaque allemande de l'Union soviétique, d'autres furent mis en place au fur et à mesure que les territoires d'Europe de l'Est étaient conquis. Les autorités allemandes, leurs alliés et leurs collaborateurs en établirent dans d'autres régions, notamment, en Hongrie en 1944 lorsque les autorités du pays participèrent à la construction de ghettos temporaires. Les Juifs y étaient rassemblés avant leur déportation.

L'objectif du recours aux ghettos

Les autorités allemandes établirent d'abord les ghettos pour isoler et contenir les vastes populations locales de Juifs dans l'Europe de l'Est occupée. Dans un premier temps, elles y concentrèrent donc les résidents juifs d'une ville et ses environs. Cependant, à partir de 1941, elles y déportèrent également des Juifs venus d'ailleurs sur le continent (y compris d'Allemagne).

Le travail forcé devint une caractéristique centrale de la vie de nombreux ghettos. En théorie, il s'agissait prétendument d'aider à financer la gestion du ghetto et à soutenir l'effort de guerre allemand. Des usines et des ateliers furent d'ailleurs installés à proximité afin d'exploiter la main-d'œuvre incarcérée. Les tâches y étaient souvent physiques et éreintantes.

La vie dans le ghetto

Vie quotidienne dans le ghetto de Varsovie

La vie dans le ghetto était misérable et dangereuse. La nourriture, l'hygiène et l'assistance médicale y étaient précaires. Des centaines de milliers de gens moururent de faim, de maladie, de froid, mais aussi de fatigue en raison du travail forcé. De plus, les Allemands tuaient les prisonniers, recourant à diverses formes de violence injustifiée : coups, torture, exécutions arbitraires, etc.

Cependant, les Juifs dans les ghettos s'efforçaient de maintenir un sens de la dignité et de la communauté. Des écoles, des bibliothèques, des services sociaux et des institutions religieuses permettaient de créer des liens entre les habitants. Ceux-ci tentèrent de consigner la vie dans les ghettos : les archives d'Oneg Shabbat et les photographies interdites sont des exemples puissants de résistance spirituelle. Les mouvements clandestins qui organisaient une résistance armée étaient fréquents, le plus connu d'entre eux étant le soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943.

La liquidation des ghettos

Dès 1942, les Allemands, leurs alliés et leurs collaborateurs assassinèrent les habitants des ghettos en masse et éliminèrent leurs structures administratives. Ce processus était désigné sous le nom de « liquidation », et faisait partie de la « Solution finale à la question juive ». La majorité des Juifs des ghettos étaient tués soit dans des exécutions de masse sur des sites voisins, soit après avoir été déportés dans des centres de mise à mort. Pour la plupart, ceux-ci se situaient, à dessein, près des grands ghettos de Pologne occupée, ou bien étaient facilement accessibles par train.

Qui sont les responsables de la Shoah et de la Solution finale ?

De nombreuses personnes sont responsables d'avoir mené à bien la Shoah et la Solution finale.

Au plus haut niveau, c'est Adolf Hitler qui a inspiré, ordonné, approuvé et soutenu le génocide des Juifs d'Europe. Il n'a cependant pas agi seul. Il n'a pas non plus élaboré dans tous ses détails la Solution finale. D'autres chefs nazis ont directement coordonné, planifié et mis en place le meurtre de masse, parmi lesquels Hermann Goering, Heinrich Himmler, Reinhard Heydrich, et Adolf Eichmann.

Par ailleurs, des millions de gens en Allemagne et dans d'autres pays d'Europe ont participé à la Shoah. Sans leur concours, le génocide du peuple juif n'aurait pas été possible. Les chefs nazis comptaient sur des institutions et organisations allemandes, sur les autres puissances de l'Axe, sur la bureaucratie et les administrations locales, et sur les individus.

Les institutions, les organisations et les particuliers en Allemagne

Adolf Hitler prend la parole lors d'un rassemblement

Les chefs nazis devaient compter sur de nombreuses institutions et organisations allemandes pour mettre en place la Shoah. Avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, de nombreuses actions anti-juives furent lancées et menées à bien par diverses organisations nazies. Celles-ci comprenaient le Parti nazi, la SA (Section d'assaut ou Chemises brunes) et la SS (Schutzstaffel, escadrons de protection). Une fois la guerre commencée, la SS et ses affiliés de la police se montrèrent particulièrement meurtriers. La Sicherheitsdienst (SD, Police de sécurité), la Gestapo, la Police criminelle (Kripo) et la Police de l'ordre jouèrent un rôle actif et destructeur dans le meurtre de masse des Juifs d'Europe. Parmi d'autres institutions présentes dans la Solution finale, on trouve également l'armée allemande, les chemins de fer et les systèmes de santé publics, l'administration et le système judiciaire, ainsi que les commerces, les compagnies d'assurance et les banques.

En tant que membres de ces institutions, d'innombrables soldats, policiers, fonctionnaires, avocats, juges, hommes d'affaires, ingénieurs, médecins et infirmiers choisirent d'appliquer la politique du régime. Des Allemands ordinaires participèrent également à la Shoah de diverses manières. Certains acclamaient les Juifs que l'on battait ou humiliait. D'autres les dénonçaient pour avoir enfreint les lois et règlements raciaux. Et nombre d'entre eux achetèrent, confisquèrent ou pillèrent les biens et la propriété de leurs voisins juifs. Cette participation à la Shoah se justifiait par l'enthousiasme, le carriérisme, la peur, la cupidité, l'intérêt personnel, l'antisémitisme, et les idéaux politiques, entre autres.

Les gouvernements et les institutions hors d'Allemagne

L'Allemagne nazie ne perpétra pas la Shoah toute seule. Elle comptait sur l'aide de ses alliés et de ses collaborateurs. Dans ce contexte, « allié » s'applique aux pays de l'Axe officiellement alliés à l'Allemagne nazie, et « collaborateur » désigne les régimes et organisations qui ont coopéré avec les autorités allemandes de manière officielle ou semi-officielle. On peut citer parmi eux :

  • Les puissances européennes de l'Axe et autres régimes collaborationnistes (par exemple, la France de Vichy). Ces gouvernements adoptèrent leur propre législation antisémite et s'alignèrent sur les objectifs allemands.
  • Les administrations locales soutenues par l'Allemagne, particulièrement les forces de police. Ces organisations contribuèrent aux rafles, à l'internement et à la déportation des Juifs même dans des pays qui n'étaient pas alliés avec l'Allemagne, comme les Pays-Bas.
  • Les unités auxiliaires locales constituées de responsables militaires et policiers, et de civils. Soutenues par l'Allemagne, elles participèrent au massacre des Juifs d'Europe de l'Est (souvent de leur plein gré).

Les termes « alliés » et « collaborateurs » peuvent également désigner des individus affiliés à ces gouvernements et organisations.

Des individus partout en Europe

Dans toute l'Europe, des gens sans aucun lien avec un gouvernement ou une institution et qui n'avaient pas directement participé au meurtre des Juifs contribuèrent également à la Shoah.

Ce qu'un voisin, une connaissance, un collègue et même un ami pouvaient faire de plus fatal était de dénoncer des Juifs aux autorités nazies. Un nombre inconnu d'entre eux choisit de passer à l'action, en révélant des cachettes, en dévoilant de fausses identités chrétiennes, en signalant d'une quelconque manière des Juifs. Pour ceux-ci, la seule issue était la mort. Les motivations de ces individus étaient multiples : la peur, l'intérêt personnel, la cupidité, la revanche, l'antisémitisme, et des croyances politiques et idéologiques.

De plus, ils pouvaient tirer profit de la Shoah : des non-Juifs emménageaient chez des Juifs, reprenaient leur commerce, confisquaient leurs biens et leurs objets de valeurs. Ces gestes firent partie du vol et du pillage généralisés qui accompagnèrent le génocide.

Mais la plupart du temps, les individus qui contribuèrent à la Shoah le firent par leur inaction et leur indifférence au supplice de leurs voisins juifs. Ils deviennent alors des spectateurs-témoins, passifs.

Qui furent les autres victimes des persécutions nazies et du meurtre de masse ?

La Shoah désigne particulièrement les persécutions systématiques cautionnées par l'État et le meurtre de six millions de Juifs. Il existe cependant des millions d'autres victimes des persécutions nazies et du meurtre de masse. Dans les années 1930, le régime ciblait divers soi-disant ennemis au sein de la société allemande. Au fur et à mesure qu'il se propageait sur le continent pendant la Seconde Guerre mondiale, des millions d'autres Européens furent victimes de la brutalité nazie.

Les Juifs étaient catégorisés comme l'ennemi principal, mais d'autres groupes étaient considérés comme une menace à la santé, l'unité et la sécurité du peuple allemand. Ce sont d'abord les opposants politiques qui furent visés, notamment les responsables et les membres d'autres partis politiques et les militants syndicaux. Étaient également concernés des gens simplement soupçonnés de s'opposer au régime ou de le critiquer. Les ennemis politiques furent donc les premiers à être incarcérés dans des camps de concentration nazis, tout comme les témoins de Jéhovah, envoyés dans les camps et en prison pour leur refus de jurer fidélité au gouvernement ou de servir dans l'armée.

Le régime s'en prit également aux Allemands dont les activités étaient définies comme nocives pour la société. Il s'agissait d'hommes accusés d'être homosexuels, les personnes accusées d'être des criminels ou des récidivistes, et les soi-disant « asociaux » (comme les individus considérés comme des vagabonds, des mendiants, des prostituées, des proxénètes et des alcooliques). Des dizaines de milliers de ces victimes furent incarcérées dans des prisons et des camps de concentration. Par ailleurs, le régime persécuta et stérilisa de force les Noirs allemands.

Parmi les autres groupes de victimes du régime nazi se trouvent les personnes handicapées. Avant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands considérés comme ayant des tares héréditaires se voyaient stérilisés de force. Une fois la guerre commencée, ces politiques se radicalisèrent. Les gens souffrant de handicaps, notamment ceux qui vivaient en institution, étaient vus comme un poids génétique et financier pour l'Allemagne. Le programme dit « d'euthanasie » fit d'eux des condamnés à mort.

Le régime nazi recourut à des mesures extrêmes contre des groupes considérés comme étant des ennemis d'un point de vue racial, civilisationnel ou idéologique : les Tsiganes, les Polonais (notamment issus de l'intelligentsia et des élites), les responsables soviétiques, et les prisonniers de guerre soviétiques. Ils furent tous victimes des meurtres de masse perpétrés par les Nazis.

Comment se termina la Shoah ?

La défaite de l'Allemagne nazie, 1942-1945

La Shoah prit fin en mai 1945 quand les principales puissances alliées (la Grande-Bretagne, les États-Unis et l'Union soviétique) vainquirent l'Allemagne nazie à l'issue de la Seconde Guerre mondiale. Au fur et à mesure qu'elles avançaient sur le continent européen par une série d'offensives, elles capturèrent les camps de concentration et en libérèrent les prisonniers encore en vie, dont de nombreux Juifs. Les Alliés découvrirent également les survivants des « marches de la mort », des groupes constitués de détenus juifs et non-juifs de camps que les gardes SS avaient forcés à évacuer à pied.

Mais la libération ne permit pas de tourner la page. De nombreux survivants de la Shoah durent subir de violentes menaces antisémites constantes et furent contraints de vivre ailleurs à un moment de leur vie où ils s'efforçaient de tout recommencer. Beaucoup avait perdu des membres de leur famille et d'autres passèrent des années à rechercher des parents, des enfants, des frères et sœurs disparus.

Comment certains Juifs ont-ils survécu à la Shoah ?

Malgré les efforts de l'Allemagne nazie à exterminer tous les Juifs d'Europe, certains survécurent à la Shoah. Quelle que fût leur histoire, à chaque fois, survivre n'était possible que par un extraordinaire concours de circonstances, certains choix, l'aide de tiers (juifs ou pas), ainsi que le hasard.

Survivre en dehors des frontières de l'Europe dominée par l'Allemagne

Certains Juifs survécurent en fuyant l'Europe dominée par l'Allemagne. Avant la Seconde Guerre mondiale, des centaines de milliers d'entre eux quittèrent l'Allemagne nazie malgré de considérables obstacles à l'émigration. Ceux qui partaient pour les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres endroits qui n'étaient pas sous le joug allemand se retrouvaient en sécurité et n'avaient plus à subir les violences nazies. Puis même lorsque le conflit commença, des Juifs parvinrent à s'échapper. Par exemple, ils furent environ 200 000 à fuir l'occupation en Pologne. Ils survécurent dans des conditions terribles après leur déportation par les autorités soviétiques, bien plus à l'est.

Survivre dans l'Europe dominée par l'Allemagne

Un petit nombre de Juifs parvint à survivre tout en ne quittant pas les régions dominées par l'Allemagne. Souvent, ce fut grâce à des gens qui leur vinrent en aide. Les efforts pour sauver les Juifs prirent diverses formes, depuis les actions isolées d'individus jusqu'aux réseaux organisés de toutes tailles. À travers toute l'Europe, des non-Juifs encoururent des risques énormes pour secourir des voisins, des amis, des inconnus juifs. Ils leur trouvèrent par exemple des lieux où se cacher, de faux papiers qui leur donnaient une nouvelle identité de chrétien, de la nourriture ou des provisions. D'autres Juifs devinrent membres de mouvements de résistance et survécurent. Enfin, d'autres parvinrent, contre toute attente, à sortir vivants des camps de concentration, des ghettos, et même des centres de mise à mort.

Après la guerre

Enfants dans le camp de personnes déplacées de Bad Reichenhall.

Si la Shoah se termina avec la guerre, la terreur et le génocide dont elle a hérité laissèrent des traces. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce sont six millions de Juifs et des millions d'autres victimes qui avaient péri. L'Allemagne nazie, ses alliés et collaborateurs avaient dévasté et anéanti des milliers de communautés juives à travers toute l'Europe.

Au lendemain de la Shoah, les Juifs qui s'en étaient sortis vivants devaient souvent faire face à la terrible réalité d'avoir perdu des familles et des communautés entières. Certains purent retourner chez eux et choisirent de reconstruire leur vie en Europe. Mais nombre d'entre eux avaient peur des violences et de l'antisémitisme d'après-guerre. Immédiatement après le conflit, ceux qui ne pouvaient ou ne voulaient pas rentrer durent souvent vivre dans des camps de personnes déplacées. Certains durent attendre des années avant d'émigrer vers un nouveau foyer.

Après la Shoah, le monde dut lutter pour accepter les horreurs du génocide, pour commémorer les victimes, et pour que les auteurs des crimes soient tenus responsables. Ces efforts importants sont encore en cours.